Le temps qui passe
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La semaine dernière, j’entendais quelqu’un dire, à propos de son anniversaire : « ça me déprime de rajouter un chiffre à mon état-civil. Chaque année qui passe nous rapproche quand même un peu plus de la fin ».
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Ces mots ont résonné en moi – d’accord, vue ainsi, cette perspective est carrément sinistre. En plus d’être inéluctable. Et si on essayait de prendre les choses autrement ?
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PS : j’ai pris ces 2 photos à la plage, le week-end dernier. C’était la première fois que je faisais voler Dumbo toute seule, et j’ai ressenti un incroyable élan de liberté. Je crois que je ne devais pas être plus heureuse le jour où je me suis élancée à vélo sans petites roues.
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Le culte que notre société voue à la jeunesse
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Je ressens aussi parfois cette angoisse fugace, cette peur de vieillir. Notre société qu’on dit ouverte laisse pourtant si peu de choix face à cette question du vieillissement. Sous peine d’être déclarés hors du jeu, on est sommés de participer à cette quête permanente de jeunesse. Au passage, souvent dévoyée à des fins commerciales. Accepter de vieillir me semble entrer en contradiction avec ce culte voué à la jeunesse.
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Autre souci plus personnel. Pour ne rien arranger, plus les années passent, plus elles semblent filer de plus en plus vite. Difficile d’accepter que notre perception du temps qui passe change avec les années.
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Accepter de vieillir est souvent vu comme un renoncement. Serions-nous condamnés à courir vers un idéal impossible à atteindre ?
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Et si on voyait les choses autrement ?
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Après tout chaque jour nous sommes plus riches de notre expérience de vie. On représente souvent la jeunesse comme un idéal. Mais personnellement je ne rêve pas de retrouver mes 20 ans; je me sens bien plus en harmonie aujourd’hui avec ce que je suis vraiment.
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Il faut du temps pour se construire, puis se connaître et enfin exprimer ses désirs profonds. Je sais, j’aurais gagné un temps fou en mettant moins de temps à franchir ces étapes. Mais n’est-ce pas justement ce temps-là qui fut nécessaire pour devenir ce que je suis ?
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Accepter de vieillir, c’est aussi retrouver sa jeunesse
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Je suis convaincue que la vraie jeunesse n’est pas dans l’apparence; c’est un état d’esprit. Certains ont la capacité de retrouver cet émerveillement propre à l’enfance jusqu’à leur dernier jour. Puisque de toute façon la fin est inéluctable, autant la croquer à pleines dents, cette vie !
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Chaque jour continue à nous apporter de belles surprises, à nous de les voir et de chérir ces moments de grâce. Parce que le monde est toujours aussi beau que lorsque nous le découvrions avec nos yeux d’enfant. C’est juste nous qui nous sommes habitués à ces miracles quotidiens.
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Tout n’est pas que beauté, certes. Mais il y a dans chacune de nos journées des moments merveilleusement doux, follement drôles ou d’une émouvante beauté – et parfois tout ça à la fois. Ils sont juste là, sous nos yeux. Alors savourons chacun de ces moments comme un trésor.
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Semer le bonheur
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Qui sait, à savourer cette joie de vivre, elle pourrait bien être contagieuse ? Et si on devenait des semeurs de bonheur, prêts à souffler sur ces grains de folie pour les faire pousser un peu partout autour de nous ?
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Alors oui, c’est inéluctable : chaque jour j’avance sans la moindre possibilité de revenir sur mes pas. Mais si le nombre de jours qui restent devant moins diminue, à moi de rendre chacun d’entre eux chaque jour un peu plus précieux. Parce que je veux que ma vie soit de plus en plus belle. Et si nous arrêtions cette comptabilité mortifère pour nous laisser porter vers la simple joie d’être là ?
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Profiter de chaque instant de bonheur, n’est-ce pas ce qui compte vraiment ?
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12 Commentaires
12 octobre 2017 23 h 28 min
Et oui ! Moi non plus je ne reviendrais pas en arrière :) Je pense aussi que la vieillesse peut être très belle. Il y a juste la question de la santé et de la fin de vie qui me chiffonne dans cette histoire … j’espère bien partir en fanfare sans passer par la phase compliqué de… tu sais, la fin quoi. Comme beaucoup de monde j’imagine !
tout comme toi !!!! la fin de vie, l’isolement en mauvaise santé, autant de sujets qui me font peur. mais j’essaie d’accueillir mes peurs et de vivre mes joies, au jour le jour…. belle journée à vous 2!
Oui Isacoolpix, cette ombre plane sur chacun d’entre nous; mais je me dis que ça ne sert à rien de cultiver nos peurs. Alors autant se construire des stocks de jolis souvenirs en pagaille. J’entends plein d’oiseaux qui pépient dehors, cette journée s’annonce très belle !
Oui, on porte tous cette angoisse en nous, que je double de celle de devenir un fardeau pour ceux que j’aime.
Je suis désolée, je sais que vous avez traversé une sacrée épreuve il y a quelques jours – puis-je vous envoyer un bisou ?
C’est drôle, moi je ne pense pas du tout à tout ça, jamais.
C’est sans doute parce que j’ai eu de merveilleux exemples dans ma famille….
Et puis aussi, je trouve que s’angoisser pour quelque chose qui n’existe pas encore, c’est doublement plus lourd. On n’empêche pas quelque chose d’arriver parce qu’on en a peur…
13 octobre 2017 9 h 40 min
J’avoue acquérir une certaine sagesse et une certaine sérénité en viellissant. Bon, je suis une angoissée et je le resterait. mais je gère mes inquiétudes bien mieux qu’avant ! Je m’assume aussi beaucoup plus…
Il fait bon de vieillir !
Virginie
Oui Virginie, on les a bien méritées ces rides – il en a fallu des années pour les dessiner ! Avec l’âge, je n’ai plus peur de dire ce que je pense ou de paraître ridicule. Et surtout, je dis encore plus facilement que je ne sais pas. Parce que plus on avance, plus a de trucs à apprendre, à découvrir.
Je reste émerveillée devant des gens comme Stéphane Hessel, qui a réveillé la jeunesse et couru le monde pour parler de notre besoin d’humanité jusqu’aux toutes dernières semaines de sa vie.
Ces jours-ci je me régale aussi en découvrant en direct sur instagram les aventures d’Agnès Varda & JR, actuellement en Californie pour promouvoir leur film. A 89 ans, elle est une vraie gamine. Peine d’espièglerie elle dame le pion aux journalistes, expose les doigts de pieds en version XXL sur des façades d’immeuble et fait la sieste pieds nus dans un couloir avec Angelina Jolie. Voilà, quand je serai grande, je veux être Agnès Varda !
13 octobre 2017 9 h 48 min
J’ai peur qu’à force de gommer tout ce qui pourrait nous angoisser et s’émerveiller à la vue d’un oiseau qui chante, notre vie devienne carrément mièvre.
Tu dis ‘il faut du temps pour se construire’ et je rajoute ‘il faut prendre des coups, tomber, se relever pour se construire’. Il faut connaitre le stress, l’angoisse, les remords et les regrets pour apprécier la joie et le bonheur.
Je comprends ce que tu veux dire, Courir après sa jeunesse, c’est dépenser de l’énergie inutilement, Mais se laisser porter vers la simple joie d’être là ne te ressemble pas. Tu as des tas de projets et tes ‘journées marathon’ sont loin d’être lisses et sans accrocs.
Le bonheur s’apprécie mieux quand on va le chercher, qu’on se bat pour l’avoir.
Et je crois que c’est ce que tu fais tous les jours.
Ce que tu dis est très, très intéressant Jo. Oui, j’ai aussi l’impression de mieux savourer encore ces moments de bonheur quand il surgit par hasard là où on ne l’attend pas.
Mais d’un autre côté, je reconnais cette même joie et empathie chez Virgile, qui n’a pas besoin d’avoir l’impression de « mériter » ce moment de pur bonheur.
Pendant longtemps j’ai cru que mon histoire familiale – assez mouvementée – m’avait permis de devenir ce que je suis. Avec les années, je n’en suis plus du tout convaincue. Je fais avec, j’essaie d’en tirer parti mais pas « grâce à ». C’est vraiment un truc que j’essaie d’apprendre avec mes enfants ; savourer le bonheur sans une once de culpabilité – sans me demander si je le mérite, ou pas.
Mais tu as raison, c’est génial de construire des projets; je suis d’ailleurs très excitée à l’idée de couper 4 m de planches de chêne aujourd’hui pour mon dernier chantier. Parce que le bonheur est aussi dans ce qu’on fait : se dire qu’on est capable de repousser nos limites, c’est aussi une grande source de joie.
13 octobre 2017 11 h 40 min
Je suis tout à fait d’accord avec ton paragraphe qui dit que nous sommes plus riches d’expérience avec l’âge, qu’on se connaît mieux. Moi non plus je n’aimerais pas revenir à mes 20 ans !
Quand j’ai eu 39 ans, j’ai commencé à déprimer en pensant aux 40 qui se profilaient. Stupide. Mais j’étais aussi dans un tourment professionnel et en prises avec de grands questionnements existentiels qui ne me faisaient pas beaucoup de bien. L’heure du bilan était plutôt néfaste, en l’occurrence.
Heureusement ma vie privée et intime était plus sereine, et c’est aussi le moment qu’à choisi mon homme, le jour de mes 40 ans, pour me demander en mariage, après plus de 15 ans de vie commune et deux enfants, histoire de me dire qu’il s’en foutait, de mon âge, et qu’il voulait bien passer ses vieux jours en ma compagnie… (j’ai dit Oui)
A l’aune de mes 50 ans, je ne suis plus DU TOUT dans le même état d’esprit qu’à la veille de mes 40. Bon OK, c’est pour janvier 2019, mais ça commence à sentir le roussi. Hé bien je le vis très bien.
J’ai pris conscience de tout ce que tu dis, et surtout, surtout, je me sens tellement plus en harmonie avec moi-même. Je me sens libre et forte, j’assume. Tout. Et j’emmerde ceux que ça dérange.
J’ai lu quelque part que vieillir est encore la meilleure façon de ne pas mourir. C’est d’une folle évidence !
NB : j’adore ta première photo, avec la grande grande ombre. Quel angle de vue intéressant ! Bravo avec Dumbo !
14 octobre 2017 22 h 07 min
J’ai lu cette citation de Prévert « on reconnait le bonheur au bruit qu’il fait quand il s’en va ». Alors je l’ai inscrite sur le tableau de la cuisine; Pour ne pas oublier.
16 octobre 2017 11 h 07 min
Olala que j’aime ces articles ! Moi j’aime vieillir parce que je me sens tellement plus à ma place, à l’aise avec qui je suis, ce que je pense, ce que je fais et pour rien au monde je voudrai retourner en arrière. Le seul truc que j’aimerai c’est avoir l’impression que le temps file plus lentement. Et puis il n’y a pas vraiment d’âge pour s’extasier devant notre curiosité de la vie et je crois qu’en vieillissant je m’extase encore plus ce qui fait parfois déprimer mes grands ados ;-).
Et tes photos sont top !